Le président français Emmanuel Macron a exhorté le président intérimaire syrien, Ahmed al-Sharaa, à protéger toutes les communautés du pays à la suite des attaques sectaires meurtrières survenues ces derniers mois. Macron a fait ces remarques mercredi à Paris, lors de la première visite officielle de Sharaa dans un pays européen depuis la chute du régime de Bachar al-Assad en décembre dernier.
Des préoccupations sur les violences récentes
Le président français a exprimé ses inquiétudes concernant la violence récente visant les minorités druzes et alaouites en Syrie. “Vous devez tout faire pour assurer la protection de tous les Syriens, sans exception”, a déclaré Macron à Sharaa, ajoutant que “les crimes ont profondément choqué les amis de la Syrie”. Le président français a également demandé à Sharaa de poursuivre en justice les responsables des attaques sectaires.
En mars, plus de 1 700 personnes, principalement issues de la secte alaouite d’Assad, ont été tuées lors d’affrontements sectaires qui ont attiré la condamnation internationale. Ces violences ont suscité de vives inquiétudes concernant la capacité du gouvernement intérimaire à maîtriser la violence extrémiste et à garantir la sécurité des minorités en Syrie.
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Des tensions persistantes et des critiques contre Sharaa
Le dirigeant intérimaire syrien, ancien rebelle islamiste, a été critiqué par certains en France comme un “jihadiste devenu homme politique”. Bien que sa visite ait suscité des débats, Macron a défendu la rencontre, soulignant que l’engagement avec Sharaa était essentiel pour tenter de stabiliser la situation en Syrie et éviter davantage de souffrances pour la population.
Une levée progressive des sanctions
Le président français a indiqué qu’une levée des sanctions contre la Syrie pourrait être envisagée si les nouvelles autorités parvenaient à restaurer l’ordre et à améliorer la sécurité dans le pays. Macron a également souligné que les États-Unis devraient envisager de reporter tout retrait de leurs troupes en Syrie. Selon lui, l’absence de troupes américaines à ce moment crucial risquerait de déstabiliser encore davantage la région.
Des frappes israéliennes contre-productives
Macron a décrit les frappes aériennes israéliennes en Syrie comme contre-productives, y compris une attaque qui a frappé près du palais présidentiel à Damas vendredi dernier. “Quant aux bombardements et incursions, je pense que c’est une mauvaise pratique. On ne garantit pas la sécurité de son pays en violant l’intégrité territoriale de ses voisins”, a-t-il déclaré.
Des pourparlers indirects avec Israël
Lors de la conférence de presse conjointe à l’Élysée, Sharaa a confirmé que des discussions indirectes avec Israël étaient en cours, en utilisant des médiateurs non nommés. Il a précisé que l’objectif était “d’essayer de contenir la situation afin qu’elle n’atteigne pas un point où elle échappe au contrôle des deux parties”.
Des critiques sur les sanctions européennes
Sharaa a également contesté le maintien des sanctions européennes, les qualifiant de “non justifiées”. Selon lui, ces sanctions ont été imposées au régime précédent en raison de ses crimes et n’ont aucune légitimité à être prolongées.
Une rencontre avec le témoin clé “Caesar”
Avant sa rencontre avec Macron, Sharaa a eu une discussion privée avec Farid al-Madhan, surnommé “Caesar”, un ancien photographe militaire syrien qui a fait sortir clandestinement des dizaines de milliers d’images montrant la torture et les abus sous le régime d’Assad. Madhan avait révélé son identité en février lors d’une interview avec Al Jazeera. Il avait fui la Syrie en 2013 avec environ 55 000 photos, dont des images de corps émaciés et de victimes avec les yeux arrachés.
Conclusion
La rencontre entre Emmanuel Macron et Ahmed al-Sharaa marque un moment clé dans les relations internationales concernant la Syrie. Si la levée des sanctions reste un sujet délicat, les discussions ont ouvert la voie à un dialogue continu entre la France et la Syrie dans un contexte de reconstruction et de stabilité régionale. La priorité reste cependant la protection des minorités et la fin des violences sectaires, qui demeurent des défis majeurs pour le nouveau gouvernement syrien.
Cet article a été publié à l’origine sur : rfi