La France, forte de sa production nucléaire significative, envisage une stratégie innovante pour valoriser ses surplus d’électricité : les dédier au minage de Bitcoin. Une proposition de loi a été déposée à l’Assemblée nationale le 11 juillet 2025 pour lancer un programme pilote de cinq ans. Ce projet ambitieux vise à transformer une énergie souvent gaspillée en une source de revenus substantiels, tout en optimisant la stabilité du réseau électrique national. En s’appuyant sur les infrastructures nucléaires existantes, le pays cherche à capitaliser sur une énergie propre et abondante pour s’imposer comme un acteur clé dans l’écosystème des cryptomonnaies, tout en explorant de nouvelles avenues de durabilité énergétique.
L’énergie nucléaire française au service du Bitcoin
Un paradoxe énergétique à résoudre
La France produit environ 70% de son électricité à partir de l’énergie nucléaire, une source stable mais parfois excédentaire, notamment la nuit ou lors des périodes de faible demande. Ces surplus, faute de capacités de stockage suffisantes ou de demande adaptée, sont souvent vendus à perte ou tout simplement non utilisés. Les députés porteurs de la proposition estiment que « Ces surplus non utilisés représentent une perte économique et énergétique inacceptable ». Le minage de Bitcoin, avec sa consommation énergétique flexible et constante, pourrait offrir une solution idéale pour absorber cette énergie excédentaire.
Des retombées économiques considérables
Selon l’Association pour le Développement des Actifs Numériques (ADAN), la redirection d’un gigawatt (GW) d’énergie excédentaire vers des opérations de minage pourrait générer entre 100 et 150 millions de dollars de revenus par an pour la France. Ces revenus permettraient non seulement d’amortir les coûts fixes de maintenance des centrales nucléaires, mais aussi d’éviter les pertes liées à la vente d’électricité à bas prix. Cette initiative est présentée comme une opportunité de générer de la richesse à partir d’une ressource déjà disponible et peu coûteuse en surplus.
Stabilité du réseau et valorisation des déchets énergétiques
Le minage comme tampon énergétique
L’un des avantages clés de l’intégration du minage de Bitcoin est sa capacité à agir comme un « consommateur flexible ». En périodes de forte production nucléaire ou éolienne/solaire intermittente, les fermes de minage pourraient augmenter leur consommation pour absorber le surplus, puis réduire rapidement leur activité lorsque la demande sur le réseau augmente. Cette flexibilité permettrait de lisser les pics et les creux de production, réduisant ainsi la nécessité de moduler la production des centrales nucléaires, une opération coûteuse et complexe.
La valorisation de la chaleur fatale
Au-delà de la consommation électrique, le minage de cryptomonnaies produit une quantité significative de chaleur. Le projet français envisage de valoriser cette chaleur dégagée pour alimenter des réseaux de chauffage urbain, des serres agricoles ou d’autres activités industrielles à proximité des centres de minage. Cette approche circulaire, déjà mise en œuvre avec succès dans des pays comme la Finlande, transformerait une externalité négative en une ressource utile, renforçant ainsi la rentabilité et la durabilité du projet.
Implantation et bénéfices collatéraux
Des centres de minage décentralisés
La proposition de loi prévoit la création de centres de minage décentralisés, idéalement implantés à proximité des centrales nucléaires ou dans des zones industrielles désaffectées. Cette localisation stratégique permettrait d’optimiser le raccordement électrique et de limiter la pression sur le réseau national existant. En outre, ces installations pourraient revitaliser des zones économiques en déclin, générant des emplois nouveaux et dynamisant l’activité locale.
L’innovation au service de l’emploi et du développement durable
Le gouvernement voit dans cette initiative une « opportunité d’innovation énergétique et économique, alignée avec les objectifs de durabilité et de souveraineté énergétique de la France ». Au-delà des revenus directs, le projet pourrait stimuler la recherche et le développement dans les technologies de minage efficientes et de récupération de chaleur, positionnant la France à l’avant-garde de cette nouvelle symbiose industrielle. Les emplois générés seraient divers, allant de la maintenance des installations à la gestion des opérations et au développement technologique.
Réactions et perspectives
Un consensus politique en construction
Les députés porteurs du projet mettent en avant son caractère « propre, contrôlable et sans émission de carbone », argumentant que l’énergie nucléaire utilisée est déjà produite et que son utilisation pour le minage ne générerait pas d’émissions supplémentaires. Le programme pilote, s’il est adopté, débuterait rapidement, avec une évaluation de sa faisabilité six mois après son lancement, ce qui témoigne de la volonté politique d’agir vite.
Des critiques mais des arguments solides
Si le minage de cryptomonnaies est souvent critiqué pour sa consommation énergétique, l’argumentaire français repose sur l’utilisation d’un surplus inexploité, ce qui tempère considérablement ces préoccupations. En évitant que ces surplus ne soient gaspillés ou ne nécessitent l’arrêt de centrales nucléaires, cette initiative contribue indirectement à la réduction des émissions de CO2, car elle évite le recours à des centrales thermiques pour compenser les fluctuations du réseau.
L’ambitieux projet français d’utiliser son excédent d’énergie nucléaire pour le minage de Bitcoin représente une convergence audacieuse entre l’innovation technologique et une gestion optimisée des ressources énergétiques. En transformant un problème de surplus en une opportunité de revenus et de stabilisation du réseau, la France pourrait non seulement renforcer sa souveraineté énergétique, mais aussi se positionner comme un leader dans l’économie des cryptomonnaies. Ce programme pilote, si couronné de succès, pourrait bien servir de modèle international pour une utilisation plus intelligente et durable de l’énergie nucléaire.